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Forfait jours dans les sociétés de services : obligations, contraintes et réalités du terrain

Christian VERDIER
24/3/2025
5 min read

Le forfait jours est une pratique courante dans les sociétés de services (ESN, cabinets de conseil, bureaux d’études, agences de communication) car il offre flexibilité et simplicité administrative. Plutôt que de comptabiliser les heures travaillées, on raisonne en jours travaillés sur l’année, ce qui s’adapte bien aux métiers à forte autonomie.

Dans un secteur où la facturation au jour est une norme, notamment en régie, le forfait jours apparaît comme la solution logique. Mais attention : il ne suffit pas d’adopter ce mode de calcul pour être juridiquement en règle. La loi impose des conditions strictes et les tribunaux n’hésitent pas à requalifier des forfaits jours mal appliqués en contrat de travail classique, avec des conséquences financières lourdes pour l’employeur.

Alors, comment gérer le forfait jours en conformité avec la réglementation, tout en tenant compte des réalités du terrain ? Quelles sont les obligations, les risques et les bonnes pratiques pour éviter toute contestation ?

Qui peut être au forfait jours dans une société de services ?

Le forfait jours n’est pas automatique et ne peut pas être appliqué à tous les salariés. Pour être éligible, un salarié doit remplir deux critères essentiels :

  • Ne pas être soumis à un contrôle horaire : il doit organiser son travail de manière autonome, sans obligation de présence à des horaires fixes.
  • Avoir un poste nécessitant une autonomie réelle : cela concerne généralement les cadres qui pilotent des missions avec des objectifs à atteindre, plutôt que des horaires à respecter.

Profils compatibles avec le forfait jours dans une société de services :

  • Consultants (stratégie, IT, transformation digitale, finance, RH, etc.).
  • Ingénieurs en bureaux d’études, experts techniques avec un travail basé sur des livrables.
  • Chefs de projet, qui définissent leur propre organisation pour atteindre leurs objectifs.
  • Créatifs en agence de communication (directeurs artistiques, concepteurs-rédacteurs…).
  • Managers et cadres commerciaux en charge de portefeuilles clients avec une gestion autonome de leur emploi du temps.
  • Au sein de la Convention Syntec, cela correspond à certaines positions, relevant au minimum de la position 3 et récemment élargit à la position 2.3.

Profils qui ne peuvent pas être au forfait jours :

  • Salariés soumis à un suivi horaire précis (techniciens support, hotline, fonctions administratives…). 
  • Consultants en régie avec des horaires imposés par le client (voir section dédiée). 
  • Profils juniors qui doivent rendre des comptes sur leurs horaires et planning quotidiens.

Astuce : connaissez-vous la modalité « Réalisation de missions » ?
Pour les collaborateurs dont les responsabilités ne peuvent s’arrêter à heures fixes, mais qui n’ont pas la possibilité d’opter pour le forfait jours, ce dispositif constitue une alternative intéressante. Il offre une moindre autonomie qu’un forfait jours, mais permet malgré tout d’accomplir des missions nécessitant une certaine flexibilité.

Tous les ingénieurs et cadres sont potentiellement concernés, sous réserve de percevoir une rémunération au moins égale au plafond de la Sécurité sociale. L’horaire hebdomadaire reste fixé à 35 heures, avec toutefois la possibilité d’effectuer des variations dans une limite maximale de 10 %, soit jusqu’à 38 h 30.

Réglementation : qu'est-ce que l’entreprise doit respecter pour appliquer le forfait jours ?

Le forfait jours est une dérogation au droit du travail, donc strictement encadré. Pour être légalement valide, il doit respecter les règles suivantes :

Une convention individuelle de forfait jours

Chaque salarié concerné doit signer une convention individuelle qui précise :

  • Le nombre de jours travaillés dans l’année (généralement 218 jours).
  • Les modalités de suivi de la charge de travail et du repos.
  • Les conditions garantissant un équilibre vie pro / vie perso.

Sans ce document, le forfait jours peut être contesté et requalifié en contrat classique, obligeant l’employeur à payer rétroactivement les heures supplémentaires.

Un accord collectif autorisant le forfait jours

Le forfait jours n’est pas un choix unilatéral de l’employeur. Il doit être prévu par un accord d’entreprise ou une convention collective.

  • Cabinets de conseil → Convention collective du Conseil.
  • Agences de communication → Convention des agences de publicité.

Sans cet accord collectif, le forfait jours est illégal.

Suivi de la charge de travail et respect du droit au repos

L’employeur doit prouver qu’il surveille la charge de travail des salariés en forfait jours, pour éviter la surcharge et garantir le respect des repos légaux (11h par jour, 35h consécutives par semaine).


Les bonnes pratiques pour le suivi dans le cadre du forfait jours :

  • Entretien annuel obligatoire sur l’organisation du travail qui aborder les sujets suivants :

- la charge individuelle de travail du salarié au forfait jours;

- l’organisation du travail dans l’entreprise ;

- l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie privée ;

- sa rémunération.

  • Outil de suivi de la charge de travail, notamment afin d'assurer le respect des temps de repos soit :

- un repos quotidien minimum de 11 heures consécutives ;

- un repos hebdomadaire de 35 heures (24 heures + 11 heures) minimums consécutives.

  • Veille sur les horaires de connexion (éviter le travail nocturne ou excessif).

Forfait jours en régie : possible ou pas ?

Le forfait jours en régie est une pratique courante, car les ESN et cabinets de conseil facturent leurs prestations à la journée. Pourtant, il peut être contesté s’il ne respecte pas certaines règles.

Problème juridique :
Si un consultant en régie doit respecter des horaires fixes imposés par le client, il n’est pas autonome et ne devrait pas être en forfait jours. Dans ce cas, il peut demander un rattrapage des heures supplémentaires et faire annuler sa convention.

Astuces pour sécuriser un forfait jours en régie :


- Privilégier des missions où le consultant gère lui-même son planning.
- Éviter toute mention d’horaires fixes dans le contrat et la mission.
- Encadrer la mission dans un cadre forfaitaire (objectifs, livrables, planning flexible) plutôt qu’un suivi horaire strict.
- S’assurer que le salarié travaille bien sur une logique de résultats et non sur une simple présence sur site.
- Documenter l’autonomie du consultant via des rapports de mission précisant qu’il organise son temps librement.

En appliquant ces bonnes pratiques, le forfait jours peut être maintenu même en régie, mais avec précaution pour éviter toute contestation.

Risques juridiques en cas de mauvaise gestion du forfait jours

- Requalification en contrat classique → Si un salarié n’a pas réellement d’autonomie, il peut contester son forfait jours et réclamer le paiement des heures supplémentaires.

- Sanctions pour non-respect du suivi → L’absence de contrôle de la charge de travail peut entraîner des condamnations pour manquement à l’obligation de sécurité.

- Pénalités en cas de non-respect des repos → Un salarié qui prouve qu’il a été surchargé sans suivi peut demander des dommages et intérêts.

Bonnes pratiques pour une gestion sécurisée du forfait jours

Le forfait jours doit être bien géré pour éviter les risques associés. Voici quelques bonnes pratiques pour assurer une gestion sécurisée du forfait jours en société de services :

- S’assurer que chaque salarié concerné signe une convention individuelle conforme aux textes.
- Préciser dans l’accord collectif les critères d’éligibilité au forfait jours pour éviter les mauvaises applications.
- Mettre en place un outil de suivi de la charge de travail pour éviter toute dérive.
- Former les managers et RH aux obligations du forfait jours pour prévenir les erreurs.
- Encadrer les missions en régie avec des clauses garantissant l’autonomie du consultant.
- Réaliser un audit interne pour vérifier la conformité des pratiques et ajuster si nécessaire.

Outils pour simplifier la gestion du forfait jours

Assurer un bon suivi du forfait jours nécessite plus qu’une simple organisation interne. L’utilisation d’outils adaptés peut considérablement faciliter la gestion et améliorer la visibilité sur l’activité des collaborateurs.

  • Suivi des jours travaillés et des RTT → Un système clair de déclaration des jours travaillés permet aux salariés et aux RH d’avoir une vision globale du temps de travail annuel.
  • Organisation des entretiens annuels obligatoires → Un planning structuré pour les revues de charge de travail évite tout oubli et sécurise l’employeur.
  • ERP dédiés aux sociétés de services → Ces solutions permettent de centraliser les données sur le temps de travail, d’intégrer les plannings et de structurer les déclarations de jours travaillés.

Par exemple, un ERP spécialisé pour les sociétés de services peut aider à fiabiliser le suivi du forfait jours, notamment en permettant aux salariés de déclarer leurs jours travaillés et en offrant une vision consolidée aux managers et aux équipes RH. En structurant ces informations, l’ERP aide les entreprises à éviter les erreurs de gestion et à disposer d’un historique fiable en cas de contrôle ou de litige.

Conclusion : le forfait jours, un outil efficace mais à manier avec prudence

Le forfait jours reste un atout majeur pour les sociétés de services, mais son application doit être rigoureuse pour éviter les risques juridiques. En régie, il peut être pratiqué mais sous conditions, et nécessite un encadrement clair pour éviter toute requalification.

En cas de doute, mieux vaut structurer son approche en amont plutôt que de risquer un contentieux coûteux.

Besoin d’un suivi efficace du forfait jours ? Une bonne gestion passe aussi par des outils adaptés. Découvrez comment un ERP dédié aux sociétés de services peut simplifier votre suivi et réduire les risques.

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